Vers la 70e minute de jeu à Nîmes, le 30/03, David ressent comme une boule dans son mollet gauche qui augmente en quelques minutes. Il préfère sortir après avoir joué 5 min avec la douleur. L’examen clinique retrouve un testing positif sur le soléaire, sous la masse du gastrocnémien latéral.
Le lendemain, l’IRM (voir cliché ci-dessous) retrouve une lésion haute du soléaire, avec une petite zone de décollement du tibial postérieur. Le protocole RICE est mis en route pendant 3 jours.
On commence le vélo à bras à J2, ainsi que le travail en piscine.
L’évolution est lentement positive, les SF disparaissent en 4 jours.
À J4, il existe encore un testing légèrement positif sur le soléaire. L’échographie est normale. Le vélo est débuté (20 min le premier jour, puis 2 fois 15 min, 4 fois 4 min, 3 fois 6 min en 15-15), ainsi que le travail excentrique. La séance de balnéothérapie est quotidienne.
À J7, l’examen clinique est normal.
À J9, la course est reprise par 20 min à allure de footing (10 km.h-1), à J10 par 3 fois 10 min à 12-13 km.h-1. Le lendemain, il fait 2 blocs de 6 min en 15-15 (surface à surface, puis surface à point de pénalty).
On introduit le travail avec ballon à J11, en conduite de balle, puis des changements de direction, pour finir par les frappes.
David a alors une grosse pression pour participer au match du lendemain contre Bordeaux. Rendez-vous est pris pour le 11 au matin. Notre avis est entendu : c’est-à-dire savoir attendre un dernier entraînement le 13 au matin pour une reprise dans le groupe et viser le match contre Dijon le 14/04.
Le 11/04 au matin, il n’y a pas de signes fonctionnels. L’examen clinique est normal en dehors d’une petite tension sur le gastrocnémien latéral. Après un travail en salle (massages, travail excentrique préparatoire à l’effort), David fait un test de 15 min en solo (courses, passes courtes et longues, détente, appuis/changements de direction) pour finir avec le groupe pour une mise en place. Il n’a aucune douleur. Il sera donc « titulaire sur le banc » le soir même, sans qu’il soit contraint de le faire.
En match contre Bordeaux, notre latéral gauche se blesse à la 12e minute. David rentre dans l’urgence sur le terrain et tout se passe bien. Aucune douleur n’est ressentie après le match ni le lendemain.
Trois jours plus tard, il rejoue 94 minutes sans se donner à fond, nous dit-il. L’examen du mollet est normal après le match, sauf la palpation qui reste sensible.
Les deux semaines suivantes sont aménagées sur le terrain, tout en poursuivant les soins locaux et le renforcement musculaire excentrique du mollet.
Ce n’est qu’après trois semaines qu’il nous dit ne plus rien ressentir de négatif sur son mollet.
Les entraîneurs disent souvent que le mollet est plus « emmerdant » à soigner qu’un quadriceps. À tort ou à raison ? La lésion du soléaire est-elle plus longue à cicatriser que celle du jumeau interne (gastrocnémien médial) ?
Une revue de la littérature sur les déchirures musculaires du mollet chez le sportif (10 études retenues : football, football australien, rugby, basket-ball et triathlon pour 5 397 athlètes) ne retrouve comme facteur de risque que l’âge et l’antécédent de déchirure du mollet (1).
Le mollet a mauvaise réputation dans le milieu du football. Les entraîneurs aiment à répéter que « le mollet, c’est toujours plus long, pour ne pas dire emmerdant », sans que l’on ait de raison objective de le penser.
L’atteinte du soléaire est plus fréquente que celle du jumeau interne dans notre exercice.
Le travail excentrique est toujours primordial pour la cicatrisation, à la main, sur appareil isocinétique ou en salle avec la presse ou en squat.
Ce CC est un bon exemple du « quand on met un joueur sur le banc, il faut savoir qu’il peut rentrer très vite sur le terrain ». La sécurité voulait qu’on attende le match suivant pour le mettre dans le groupe. La lésion avait cicatrisé, il nous manquait juste les contraintes d’un entraînement supplémentaire ou deux pour être affirmatif. Tout s’est bien passé pour finir, mais il est important d’avoir l’aval du joueur pour tenter ce genre de pari.
On a tout de même continué à gérer les charges de travail les semaines suivantes, donc à protéger le soléaire.
Le soléaire est constitué essentiellement de fibres lentes, peu adaptées aux efforts brusques et intenses. La reprise d’appui, proche de l’étirement maximal du soléaire et en phase excentrique, est le geste lésionnel le plus fréquent.
L’échographie étant souvent négative, même entre des mains expertes, l’IRM est donc l’examen le plus pertinent (2).
La lésion myotendineuse centrale (LMTC), qui touche le soléaire dans sa portion distale où se forme un tendon intramusculaire qui sera un peu plus bas une partie du tendon d’Achille, est la plus péjorative en termes de délai avant le retour dans le groupe. Dans une série américaine de 2015 (3), le délai moyen après une lésion du soléaire est de 29 jours, toutes localisations confondues, de 44 jours pour une LMTC, de 19 jours pour une lésion myotendineuse latérale comme chez David.
Le confrère interrogé constate que le mollet est plus difficile à soigner chez les plus anciens. La mauvaise réputation du soléaire pourrait être due au plus grand nombre d’adhérences interaponévrotiques (intérêt des ondes de choc pour remodeler la cicatrice) et souvent au retard diagnostique.
- Green B, Pizzari T. Calf muscle strain injuries in sport: a systematic review of risk factors for injury. Br J Sports Med, 2017, 51, 1189-1194.
- Balius R, Rodas G, Pedret C, Capdevila L, Alomar X, Bong DA. Soleus muscle injury: sensitivity of ultrasounds patterns. Skeletal Radiol, 2014, 43, 805-812.
- Pedret C, Rodas G, Balius R, Capdevila L, Bossy M, Vernooij RW, Alomar X. Return to play after Soleus muscle injuries. Orthop J Sports Med, 2015, 22, Collection 2015 Jul.