Ludovic présente une arthropathie ancienne de la 1re MTP gauche (voir cliché ci-dessous). Les flexions plantaire et dorsale sont nettement limitées. On peut parler d’hallux rigidus (enraidissement du gros orteil) le concernant. Il a ressenti des douleurs importantes hier soir en championnat à Brest. On décide d’une infiltration de Diprostène, ce jour. 

À J3 de l’injection, il se sent déjà très bien et s’entraîne avec le groupe. Il joue quelques minutes en Coupe d’Europe le 31/10 sans douleurs. 

On n’a pas eu à refaire de nouvelles infiltrations au cours de la saison, même si les douleurs revenaient par moment, mais en début de saison suivante. Ludovic prend cependant un comprimé de diclofénac 100 chaque jour de match – entre besoin et rituel. 

Quelle est la fréquence de cette pathologie chez le footballeur ? Quelles sont les possibilités thérapeutiques ?

L’hallux rigidus affecte 2,5 % des personnes de plus de 50 ans, avec comme facteurs de risque les traumatismes souvent cités, l’hallux valgus et les pathologies inflammatoires et métaboliques (1). 

L’arthrose de la 1re MTP en général et l’hallux rigidus pour le stade évolué sont des pathologies relativement fréquentes chez le footballeur (mais pas de statistiques officielles à notre connaissance), pour plusieurs raisons : les risques de traumatismes directs, le rôle primordial du 1er rayon à l’appui dans la course à haute intensité et, à un degré moindre, la répétition des frappes de balle. Le morphotype peut également jouer un rôle. 

Au stade d’arthrose avec une limitation importante d’amplitude articulaire, soit l’hallux rigidus, la gêne fonctionnelle peut être majeure – dans de rares cas, à l’origine d’un arrêt de carrière. À titre d’exemple, sur dix ans, la société Europ Sports Assur (société d’assurance individuelle pour les footballeurs professionnels) a dû traiter deux dossiers de perte de licence pour une arthropathie métatarso-phalangienne du 1er rayon.

L’arsenal thérapeutique est habituel : infiltration de cortisone en respectant 15 jours de repos après, acide hyaluronique, travail des mobilités, physiothérapie, SO.

Il m’est arrivé de suivre au cours d’une saison un joueur présentant une arthrose de la 1re MTP avec un enraidissement majeur. La symptomatologie valait surtout par la compression du nerf dorsal par un ostéophyte volumineux. Un avis chirurgical avait récusé l’intervention, au risque de déstabiliser l’articulation. On traitait le problème à coup de xylocaïne 1 à 2 heures avant le match, avec un relatif succès sur la durée.

Quand le traitement médical montre ses limites, on peut proposer une solution chirurgicale, sans certitude quant à la possibilité de reprendre la pratique sportive au niveau antérieur. La cheilectomie percutanée (ablation des ostéophytes par ponçage) est la moins agressive. En revanche, l’ostéotomie conservatrice, l’arthrodèse et l’arthroplastie par prothèse sont des solutions à proposer après l’arrêt de la carrière sportive.

  1. Lam A, Chan JJ, Surace MF, Vulcano E. Hallux rigidus: How do I approach it? World J Orthop, 2017, 18, 364-371.