À l’entraînement le 13/02, sur la dernière frappe devant le but avant la fin de la séance, Robert ressent une vive douleur à la face antérieure de cuisse gauche. Il arrête immédiatement et a du mal à marcher. Le testing est positif sur le droit fémoral, au 1/3 supérieur et médial. À l’échographie, on retrouve une large cicatrice ancienne du droit fémoral au 1/3 moyen, de 15 à 20 cm.

On glace et on comprime avec de l’argile.  

Le lendemain matin, il se sent plutôt mieux. Le testing reste positif au 1/3 supérieur, surtout à la palpation. En plus de la cicatrice, l’échographie retrouve une petite zone de décollement à la partie latérale du droit fémoral, à l’interface avec le sartorius. L’IRM, le jour même (voir cliché ci-dessous), retrouve une LMA de grade 3 au 1/3 supérieur sur l’aponévrose superficielle et la cloison centrale.

On part sur 4 jours au minimum de protocole RICE. 

À J3, l’étirement est positif à 100° de flexion en décubitus ventral. La contraction isométrique reste sensible et la palpation douloureuse, sans plus. À l’échographie, la lame de décollement tend à diminuer.

À J4, on démarre le vélo (15 min sans résistance) et la mobilité en piscine, en tenant compte de la douleur.

À J5, il n’y a plus de gêne à la marche. L’étirement est quasi négatif. La CcR reste légèrement positive, avec beaucoup d’appréhension. À la palpation, la zone retrouve de la souplesse, toujours sensible. Sur vélo, Robert augmente de lui-même la résistance (15 min à 80 watts – on lui demande de respecter la non-douleur). On débute les massages sur la cicatrice et le travail de contraction isométrique à la main.

À J6, l’étirement est négatif et la CcR quasi négative. À la palpation, le quadriceps est souple, peu sensible. Robert est beaucoup dans l’appréhension. On démarre le travail isocinétique après la réalisation d’un test sur la jambe saine (on n’a pas de test de début de saison, car il était blessé aux ischio-jambiers lorsqu’il a signé) à 30 % du max, 3 fois 10 reps 5°/s, soit 70 Nm.

À J8, l’examen clinique est normal. On passe à 40 % en iso excentrique, et sur le vélo il fait du 1’-1’, 12 reps. 

À J10, il court 2 fois 15 min entre 10 et 12 km.h-1.

À J11, il court 4 fois 4 min entre 13 et 15 km.h-1 et on passe à 120 Nm en excentrique iso. 

On fait une pause à J12.

Il fait une nouvelle séance de course à J13, 3 fois 8 min de 15-15, de surface à surface (72 m, 17,2 km.h-1), puis travaille avec le ballon. En isocinétique, il fait 3 fois 10 reps à 135 Nm.

À J14, il n’y a aucune douleur sur le quadriceps. Il travaille en concentrique en pyramidal sur appareil isocinétique sans problème (10 fois 10 reps entre 300 et 210°/s). Sur le terrain, il fait 3 blocs de 4 min en 10-20 (55 m), 8-22 (49 m) et 5-25 (33 m) sans souci.

À J15 on ne fait que des soins. 

À J16, il reprend la course, 2 fois 15 min à 10-12 km.h-1. On reprend le travail iso excentrique à 130 Nm. 

À J17, l’examen clinique est normal en dehors d’une gêne à l’étirement du quadriceps au 1/3 moyen, sur le droit fémoral. L’échographie est inchangée. On travaille en iso excentrique à 140 Nm sur le quadriceps, 3 fois 10 reps à 30°/s, sans douleur. Sur le terrain, il travaille la course, les appuis et les changements de direction. En chaîne ouverte, en flexion de hanche pour contrôler le ballon, il sent une douleur à la face antérieure de hanche, qui ne dure pas. L’IRM retrouve une diminution de l’œdème, l’absence de nouvelle lésion, mais encore une petite zone de décollement.

À J18, Robert se sent mieux. L’étirement est quasi indolore. On augmente le travail excentrique à 150 Nm (3 fois 10 reps à 30°/s), puis le vélo 3 fois 6 min en 30-30, et les kinés lui font du laser et un travail des mobilités en fin de séance.

À J19, l’examen clinique est normal. L’échographie ne retrouve qu’un minime décollement proche de l’insertion, à la partie supérieure. On passe à 160 Nm en excentrique, très bien réalisé, sans douleur. Puis il travaille en salle avec élastique. Sur le terrain, il fait 6 min de box-to-box, puis un travail d’appuis et de changements de direction avec ballon, jonglage, passes courtes appuyées. On finit par du froid et de la compression.

À J20, 21 et 22, on augmente progressivement la charge de travail individuel en salle et sur le terrain afin de lever toutes les appréhensions. 

Robert est remis dans le groupe à J23 de sa lésion. L’examen clinique est normal. On prépare chaque séance à la main (massages), en iso (excentrique, 3 fois 10 reps à 30°/s à 100 Nm) et en salle (mobilité fonctionnelle avec élastique surtout).

Il s’entraîne trois fois avec le groupe.

Il participe à son premier match à J26 en rentrant à la 78e minute. Il marque à la 79e minute le but de la victoire.

On poursuit le lendemain le protocole de prévention à base de massages et de travail excentrique à la main, avant la séance et un travail en salle en chaînes ouverte et fermée.

Une IRM corps entier à la signature nous aurait-elle aidés ? Quelle est la place des PRP sur une lésion myo-aponévrotique ? La non-douleur reste-t-elle le garde-fou de toute rééducation ? Quel est l’intérêt d’un test isocinétique de début de saison ?

Une IRM corps entier à la signature nous aurait appris la présence d’une image cicatricielle sur le quadriceps. Sans doute aurions-nous mis en place un travail de prévention, mais pendant combien de temps ? À noter d’ailleurs qu’une échographie aurait été suffisante dans ce cas précis d’une cicatrice musculaire.

Le fait qu’il n’ait pas pu faire les tests fonctionnels aurait sans doute dû nous inciter à faire une imagerie plus systématiquement.

Cependant, un test isocinétique reste plus intéressant lorsqu’il est réalisable, car il donne une information fonctionnelle. Un déficit de force de 20 ou 30 % sans cicatrice est plus utile à connaître que la présence d’une cicatrice sans déficit de force. Notre problème est qu’il n’a pas pu être réalisé, car le joueur est arrivé blessé.  

Il nous semble qu’il n’y a pas de places pour les PRP dans ces lésions myo-aponévrotiques. Une récente revue de la littérature va d’ailleurs encore une fois dans ce sens, que ce soit en termes de douleur, de fonction, de délai de retour dans le groupe et de récidive (1).

Pour ce type de lésion, 23 jours avant de retourner dans le groupe constitue un très bon délai. Mais on voit bien la difficulté à avoir un travail linéaire, ce qui est le lot habituel. La rééducation et surtout la réadaptation sur le terrain sont émaillées de jours où on avance, puis de jours où on allège le travail (J14), avant de repartir (J18), tout cela pour tenir compte de la douleur – tout particulièrement chez un joueur qui s’autoévalue en permanence. 

La non-douleur est bien le garde-fou de toute rééducation et du réentraînement sur le terrain.

On voit l’intérêt du travail excentrique qui valide à lui seul ou presque la solidité de la cicatrice. 

Le but à la 79e minute, une minute après son entrée en jeu, n’a rien à voir avec la rééducation : ça se saurait !

Le collègue interrogé souligne que la lésion du droit fémoral survient souvent dans un contexte de fatigue (enchaînement de matches, séances devant le but, de sprints, antécédents de blessure…). Elle pose un problème du fait d’une disparition assez rapide des douleurs, ce qui peut amener à faire des bêtises pour les délais de reprise. Enfin, on se donne quelques jours de plus si la lésion survient sur le pied de frappe. Il précise que le test isocinétique est également un élément important dans la prévention, une faiblesse devant amener à faire un travail spécifique de renforcement en prévention ainsi qu’à proposer un allègement des séances de tirs au but.

  1. Grassi A, Napoli F, Romandini I, Samuelsson K, Zaffagnini S, Candrian C, Filardo G. Is Platelet-Rich Plasma (PRP) Effective in the Treatment of Acute Muscle Injuries? A Systematic Review and Meta-Analysis. Sports Med, 2018, 48, 971-989.